Envoi d’un salarié en mission en Chine
1. Que faut-il entendre par détachement ou expatriation ?
Lorsqu’une société française envoie un salarié en mission à l’étranger, les termes « expatriation » et « détachement » sont généralement employés pour décrire ces circonstances particulières d’exécution du contrat de travail.
Dans le language courant, la durée de la mission dictera l’emploi de l’un ou de l’autre de ces termes, le détachement faisant référence à une mission de courte durée et l’expatriation à une mission de longue durée.
Toutefois, ces deux termes n’ont en réalité de signification qu’au regard du droit de la sécurité sociale.
La présente fiche vise donc à décrire l’ensemble des conséquences attachées à l’envoi d’un salarié en mission en Chine, tant en ce qui concerne son contrat de travail que son régime de protection sociale.
2. La mobilité internationale peut-elle être imposée au salarié ?
Dès lors que le contrat de travail contient une clause de mobilité internationale, rien n’interdit à l’employeur d’exiger du salarié l’exécution de sa prestation de travail à l’étranger.
Toutefois, en pratique, l’adhésion du salarié, et plus largement de sa famille, est une condition indispensable à la réussite d’une mission à l’étranger, à fortiori dans un pays tel que la Chine dont la culture est très différente de la culture française.
Pour cette raison, il est préférable pour l’employeur de s’assurer de la motivation du salarié plutôt que d’invoquer à son encontre la mise en œuvre d’une clause de mobilité internationale.
En tout état de cause, faute d’un accord, le refus du salarié peut, sous certaines conditions, constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement.
3. Le contrat de travail français du salarié doit-il rester en vigueur ?
L’employeur et le salarié peuvent parfaitement convenir de résilier son contrat de travail soumis au droit français (le « Contrat de Travail »). Dans cette hypothèse, le salarié est alors embauché localement en Chine par la société au sein de laquelle il exerce sa mission.
Néanmoins, cette option est généralement rejetée par le salarié puisqu’en l’acceptant, il perdrait de nombreux avantages liés au droit du travail français. C’est pourquoi, en pratique, le Contrat de Travail est souvent maintenu mais ses effets sont alors suspendus par le biais d’un avenant pendant la durée de la mission à l’étranger.
4. Quelles sont les conséquences du maintien du Contrat de Travail ?
Le maintien du Contrat de Travail permet au salarié de continuer à bénéficier des avantages liés à l’application du droit du travail français (ancienneté, protection contre le licenciement, etc.).
En revanche, le maintien du Contrat de Travail n’implique nullement que le salarié continue à bénéficier du régime français de protection sociale.
5. Comment est organisée la relation de travail pendant la durée de la mission en Chine ?
Tout d’abord le Contrat de Travail est révisé par le biais d’un avenant qui précise habituellement les points suivants:
– La suspension du Contrat de travail pendant la durée de la mission ;
– La durée de la mission et les modalités de son extension ;
– La couverture sociale applicable ; et
– Les modalités et conséquences de la cessation de la mission*.
Par ailleurs, les conditions et modalités d’exécution de la mission à l’étranger sont précisées dans un contrat de travail local (« Contrat Local ») conclu entre le salarié et la société l’accueillant en Chine. Sont notamment inclus les points suivants :
– La description détaillée du poste occupé pendant la mission ;
– L’application des dispositions impératives du droit du travail local, notamment en matière d’hygiène et de sécurité ;
– Les congés payés (durée, jours fériés) ;
– Le salaire de base, les primes diverses (prime de départ, prime d’expatriation, prime de différentiel du coût de la vie, etc.) et les avantages en nature (indemnité logement, indemnités pour la scolarité des enfants, déménagement, voiture, billets d’avion, etc.) ;
– Le lieu de paiement et la monnaie de référence du salaire et des primes ; et
– Le mécanisme de compensation fiscale.
Note :
(*) Le droit du travail français contient des dispositions particulières en matière de cessation de la mission et de licenciement si le salarié a été mis à disposition d’une filiale étrangère par sa maison mère française.
6. En quoi consiste la prime de différentiel du coût de la vie ?
Le décalage du coût de la vie entre la France et certains pays étrangers peut être tel qu’une simple augmentation du salaire de base ne suffit pas parfois pour permettre au salarié de conserver son niveau de vie.
Sans que cela soit une obligation légale, il est donc courant d’inclure dans le Contrat Local une prime dite de différentiel du coût de la vie dont le but est de corriger la perte de pouvoir d’achat du salarié.
Le montant de cette prime est calculé sur la base de données régulièrement mises à jour par certains cabinets de consultants spécialisés dans la gestion de l’expatriation.
7. En quoi consiste le mécanisme de compensation fiscale ?
Le mécanisme de compensation fiscale a pour objectif de palier toute pénalisation financière du salarié lorsqu’il est envoyé dans un pays où l’imposition sur le revenu est plus lourde qu’en France. Tel est le cas notamment de la Chine.
Ce mécanisme consiste donc à comparer l’impôt sur le revenu payé en Chine à celui qui serait payé en France dans une situation similaire et à verser la différence au salarié.
8. Un salarié en mission à l’étranger bénéficie-t-il du régime français de protection sociale ?
Le maintien du Contrat de Travail n’emporte en aucun cas l’assujettissement automatique du salarié au régime français de protection sociale.
Au regard du droit de la sécurité sociale, le salarié envoyé en mission à l’étranger relèvera ou non de la couverture sociale française selon qu’il est « détaché » ou « expatrié » :
– Le salarié détaché est soumis au régime de protection sociale française ; et
– Le salarié expatrié ne bénéficie pas du régime de protection sociale française, sauf affiliation volontaire.
9. Dans quelles conditions un salarié est-il considéré comme détaché ?
Est considéré en situation de détachement le salarié :
– D’un employeur ayant son siège social en France (même si la maison mère se trouve dans un autre pays) ;
– Envoyé en mission à l’étranger pour une durée n’excédant pas la durée maximum de détachement autorisée. En l’absence de convention de sécurité sociale entre la France et la Chine, la durée de détachement maximum est de 6 ans (trois ans, renouvelable une fois) ; et
– Continuant à être payé directement par l’employeur qui le détache, celui-ci s’engageant à verser au régime français de sécurité sociale l’intégralité des cotisations afférentes au salaire*.
Quand bien même ces conditions sont réunies, le détachement du salarié reste soumis au choix de son employeur, lequel peut toujours y renoncer et donc placer le salarié en situation d’expatriation.
Note :
(*) Seule la deuxième de ces conditions est impérative. Ainsi, il est admis qu’un salarié soit détaché, bien que payé par la société d’accueil, dès lors que les cotisations sociales sont réglées par l’entreprise qui le détache.
10. Quel est le régime de protection sociale du salarié détaché ?
Le salarié détaché bénéficie du régime français de protection sociale, à savoir :
– Sécurité sociale (assurances maladie–maternité–invalidité, accident du travail et maladies professionnelles, décès et vieillesse);
– Assurance chômage ; et
– Retraite complémentaire.
L’employeur a l’obligation de verser l’intégralité des cotisations du régime général (parts patronale et salariale), comme si le salarié détaché travaillait en France.
La base de calcul des cotisations comprend le salaire de base et tous les avantages en espèces (primes diverses) ou en nature (billets d’avion, logement, voiture, etc.) alloués au salarié en contrepartie de sa prestation de travail, à l’exclusion des frais professionnels.
En l’absence de convention de sécurité sociale entre la France et la Chine, le salarié détaché doit normalement être affilié au régime chinois de sécurité sociale, avec obligation pour l’employeur d’accueil de payer les cotisations afferents*.
Note :
(*) Les allocations familiales ne sont en revanche maintenues que dans la mesure où la résidence de la famille du salarié demeure en France. En conséquence, si le salarié détaché est accompagné à l’étranger par sa famille, ces allocations sont perdues.
11. Dans quelles conditions un salarié est-il considéré comme expatrié ?
Est considéré en situation d’expatriation le salarié :
– Ne remplissant pas les conditions prévues pour le détachement ;
– Dont l’employeur n’a pas choisi l’option du détachement alors même que les conditions étaient réunies ; ou
– Ayant d’abord été détaché mais dont la mission à l’étranger a dépassé la durée permettant le maintien au régime du détachement (soit 6 ans en cas de mission en Chine).
12. Quel est le régime de protection sociale du salarié expatrié ?
Le salarié expatrié ne relève pas du régime français de protection sociale. Aucune cotisation sociale n’est due en France sur son salaire mais, en conséquence, le salarié ne bénéficie pas de la protection sociale française en matière de :
– Sécurité sociale (assurances maladie–maternité–invalidité, accident du travail et maladies professionnelles, décès et vieillesse) ; et
– Retraite complémentaire.
En revanche, l’entreprise doit cotiser au régime français d’assurance-chômage pour son salarié expatrié de nationalité française ou d’un autre état membre de l’Union Européenne.
Dans ces conditions, le salarié peut toutefois adhérer à l’une ou l’ensemble des assurances volontaires du régime des expatriés gérées par la Caisse des français de l’étranger*.
Les cotisations à ces assurances volontaires** peuvent être prises en charge totalement ou partiellement par l’employeur.
Enfin, le salarié expatrié peut être maintenu aux régimes de retraite complémentaire des salariés (ARRCO) et des cadres (AGIRC) dans le cadre d’une procédure d’extension territoriale dont la demande peut émaner soit de l’employeur, soit du salarié à titre individuel. Le régime d’affiliation (assiette et taux des cotisations, personnes redevables du paiement des cotisations) varie selon la personne à l’origine de la demande d’extension territoriale.
Note :
(*) Le salarié expatrié peut également souscrire un contrat d’assurance dit « régime-loi » proposé par certaines compagnies et dont le but est de permettre aux expatriés de s’assurer eux-mêmes pour des garanties comparables à celles offertes par le régime français de protection sociale.
(**) Les assurances volontaires proposées par la Caisse des français de l’étranger recouvrent les assurances offertes dans le cadre du régime général de la sécurité sociale : (i) maladie-maternité-invalidité, (ii) accident du travail et maladies professionnelles et (iii) décès et vieillesse.